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Nuit debout

Seuls devant les murailles de l’ombre

seuls sous les parterres de neige

seuls par-dessus les épées en flammes

seuls devant un État inchangé

seuls parmi l’audacieuse houle

seuls dans le grand brasier armé

seuls devant les enfants terribles

seuls en une ombre froide

seuls sur un corbeau blanc

seuls devant les voitures d’acier

seuls à danser sur le vide

seuls sur une étoile filante

seuls devant des pantins souriant

seuls masqués de filatures

seuls sous des nourrissons en colères

seuls devant le marché des esclaves

seuls armés de mots libres

seuls font rougirent les cieux

seuls devant le monde embrumé

seuls dressés sous des mines

seuls souriant dans les ténèbres

seuls devant les ministres dépouilleurs

seuls à dépouiller les livres

seuls condamnés à l’oubli

seuls devant les chevaliers crieurs

seuls sur les chameaux du désert

seuls en une ombre de vie

seuls devant Jupiter

seuls à penser à demain

seuls qui osent montrer leurs bras

seuls devant le matin

seuls brandissant des croix

seuls inversés à la lune

seuls devant le Parnasse

seuls destinés à périr

seuls hurlant leurs lois

seuls devant ma terrasse

seuls pourrissant d’ennui

seuls sur des berges droguées

seuls devant la vie

seuls écoutant les voix nues

seuls sous les tombes d’hier

seuls devant les soldats

seuls le peuple sont l’armée

seuls à dresser le fanion

seuls devant le cor sourd

seuls noyés contre leurs cœurs

seuls on s’égare s’oubliant

seuls devant les champs libres

seuls en tissant des poèmes

seuls ils chantaient mordus

seuls devant les Harpies costumées

seuls on est pétri d’ignorance

seuls le soir descend nu

seuls devant le soleil

seuls les étoiles se ruinent

seuls elles s’écoutent descendre

seuls devant nos crimes aveugles

seuls nos voix écoutent le temps

seuls parmi le mur des morts

seuls devant l’intruse

seuls sur un morceau de pain

seuls les idiots écoutent

seuls devant les feuilles

seuls tombant sous l’arbre

seuls à l’air libre

seuls devant le marbre

seuls on a peur de perdre

seuls ils nous voient tomber

seuls devant le rivage

seuls les monts muent moyennement

seuls nous écoutons la nuit

seuls à écouter pleurer le saule

seuls devant nos mirages

seuls à peigner nos soucis

seuls dessins parfaits

seuls devant la vie

seuls armés de haillons

seuls limiers de chasse

seuls devant le gibier

seuls à court de force

seuls retournant au château

seuls écrasés sous la herse

seuls devant la mort

seuls soulevant la vie

seuls pliant ses désirs

seuls devant la brume

seuls dans la ronde

seuls sur un chemin mort

seuls devant l’ennemi

seuls se croyant forts

seuls à brandir le fléau

seuls devant les murailles de l’ombre

seuls à se rendormir.

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