La chronique de Serge
- Serge
- 29 sept. 2016
- 4 min de lecture
Parti pour une année au Canada, dans la ville d’Ottawa, je me suis donné pour objectif de retranscrire des morceaux de ma vie au pays des caribous. Je vais essayer d’être le plus fidèle à ce que je vois. Au fait, moi c’est Serge.
On t’a déjà parlé du Canada ? Si c’est pas le cas il faut quand même que je t’explique de quoi on parle. Aujourd’hui tout le monde te dit « il faut AB-SO-LU-MENT que tu ailles là-bas frère c’est un truc de ouf », sauf que personne te dit ce qui t’attend. C’est là qu’on te la met à l’envers, la majorité de tes potes y sont jamais allés, et c’est là qu’on se dit heureusement que Serge est là pour me filer les bails.
Je vais commencer par resituer de quoi on parle, tu ne le sais pas encore mais j’ai été cartographe pendant quatre ans pour l’armée de terre donc niveau géo j’ai les bases. On parle d’un pays qui fait presque quinze fois la France et qui est le deuxième pays le plus étendu après la Russie. Les mecs déjà c’est pas des petits joueurs. Ensuite ils sont maqués avec les Ricains, partage des frontières, contrôles des frontières, de la culture du « qui c’est qu’a la plus grosse » etc. Ils sont pas en mode baguette et béret basque tu vois. Je dis pas ça pour te décourager de partir frère mais faut pas être là pour golri. Prends pas mon exemple je suis ici pour faire de la recherche pour le gouvernement français, il fallait un bonhomme solide – ils ont pas cherché longtemps. En gros pour venir ici, soit c’est ton pays qui t’y envoie, soit tu gagnes à la loterie ; ouais ouais la loterie, pourquoi on t’a pas dit ? Si tu veux partir en PVT (Permis vacances travail), vous êtes tellement nombreux que tu t’inscris et tu attends que la roue t’envoie un mail…
Une fois que tu as ton ticket pour le pays du caribou, tu dois te maquer avec l’administration française : passeport, visa, AVE, contrats et j’en passe. Bref c’est long, ça peut faire quatre fois que tu envoies les mêmes documents, c’est forcément perdu. Soit Michel de l’immigration les a passé au broyeur par erreur, soit Catherine du secrétariat n’a pas transmis le dossier au bon bureau et il finit à la broyeuse.
Bon une fois que tu as téléphoné plusieurs fois, pété deux ou trois mâchoires et eu recourt à ton oncle qui bosse pour la pègre, tu es prêt à partir. C’est ce que je croyais, jusqu’à ce qu’une fois sur le sol canadien on me demande de me rendre au service de la douane et de l’immigration. Bon alors je te le dis direct, eux ils rigolent pas, ils sont payés pour être des durs et pour grogner – ils ont failli me recruter quand j’ai pris ma retraite des commandos, j’ai pas le temps de raconter. Bon tu arrives, une dame te teje un ticket et tu t’assois par terre parce que il y a déjà du monde sur les banquettes. Au bout d’une demi-heure tu demandes à celui à côté de toi depuis combien de temps il est là. Il te répond qu’il est arrivé hier soir, et que le thaï sur la banquette en face est là depuis trois mois. Moi j’ai loupé ma correspondance, mais on te dit qu’on te trouvera bien un vol pour partir… T’es donc nulle part sur les radars le temps où tu restes dans le bureau de l’immigration. Finalement c’est mon tour, je m’étais endormi sur mon sac mais le guichetier a eu l’amabilité de me réveiller à grands coups de cris dans le micro, ce qui je dois dire est singulièrement efficace. Ensuite on te demande de t’asseoir, de venir chercher une feuille, de te rassoir et de revenir chercher une feuille. Histoire de vérifier que tu es en bonne santé ou bien un peu con. Finalement tu obtiens ton visa et on « te conseille fortement de lire les petites lignes en bas du documents », parce ce sont tes droits et tes devoirs, et surtout que t’es pas chez ta mère.
Clairement àl c’est trop tard pour ta correspondance surtout que tu n’as pas encore récupéré ta valise, qui se trouve dans une zone extérieure au carrousel, car elle tourne depuis trois heures et que tu n’es pas le seul à voyager aujourd’hui. « Bon alors Serge, t’as réussi ou pas ? » Oh ça va ! Vous trouvez ça long ou quoi, moi je vous la fais short parce que j’étais en guest à l’aéroport. Bah ouais frère, c’est comme les fast pass à Disneyland, tu fais pas la queue – après faut avoir quelques contacts, ça je peux rien faire pour toi.
Enfin bref, j’ai pris mon avion je suis arrivé à Ottawa, capitale canadienne, tout allait bien jusqu’à ce que je me rende compte qu’ils m’avaient pété toutes les roulettes de ma valise les tardbâs ! Après réflexion, ils ont pas du apprécier me laisser piloter l’avion…